La route était mauvaise ce week end du 28 novembre. Des trombes d’eau s’écrasaient sur le pare-brise tandis qu’un vent violent tentait de nous déporter. Nos mains se crispaient sur le volant, surtout quand il s’agissait de doubler les camions qui défilaient à la chaîne. Nos yeux brulaient de fatigue tant nous devions redoubler de vigilance.En Espagne, c’était pire. Partie à 5H30 du matin depuis Madrid, Cristina a même dû traverser une tempête de neige, la maintenant à une vitesse de 60 km à l’heure sur l’autoroute. Pour nous, Aline et Béatrice, le voyage aura duré plus de 18 heures dans ces conditions.
Qu’importe, ce sauvetage valait la peine. Nous avons ramené 7 galgos. Mais quels galgos ! Sharif dont l’attente s’éternise depuis mars dernier ! Le dernier galgo sur lequel nous nous étions engagés avant de quitter le refuge Perrikus. Un peu perdu, cherchant à se coller constamment contre nous, sa douceur le rendait d’autant plus touchant. Son fils, Souleiman, est au chaud depuis longtemps. Cette fois, c’est son tour. Il ira vivre chez les chtimis.
Fabian a pu aussi être remonté. Une famille d’accueil s’est en effet libérée grâce à l’adoption de Remi. Il est d’une grande délicatesse malgré sa musculature. Il a une tête carrée, mais son corps est celui du galgo. C’est un grand sensible, doux et soumis. Pas étonnant qu’il s’est fait ces horribles plaies au refuge tant il souffrait d’être enfermé.
Linda (qui veut dire jolie en Espagnol), la mamie podenca de 10 ans, s’est mise à jouer avec un nounours dès son arrivée en maison. La cataracte la rend progressivement aveugle, mais il lui reste encore un peu de temps pour voir comment la vie peut être belle. Elle est en accueil chez Patricia dans les landes. Chuck était du voyage lui aussi. Son galguero avait menacé de le tuer (comment ?) car il trouvait que nous étions trop longues à le prendre. C’était une urgence. Cristina l’avait pris in extremis en accueil pour lui sauver la vie. Chuck enfonçait sa tête dans nos manteaux avec force et désespoir. A 8 ans, son passé de chasseur semblait bien trop lourd à supporter. Une dure vie sans confort ni sans affection. En Espagne, Chuck n’était qu’une arme, trop vieille aujourd’hui. Il est parti dans le Nord où une vie enfin heureuse l’attend.
Il y avait aussi la sublime Carey, l’intrépide LaÏka dont tout le monde se foutait et… Turbo. Après un an de refuge surpeuplé, Turbo est en France. Je n’arrive pas à croire qu’il est là en face moi. Je le vois depuis si longtemps sur les sites. Il est massif et fort. Saura-t-il se faire accepter par sa nouvelle famille ? La suite dira que non. A peine adopté, Turbo nous a été rendu. Il se montre un peu trop dominant. Il a besoin d’être cadré. Sa famille n’arrive pas à le gérer. Le calvaire de Turbo n’est donc pas terminé. .. Notre route est pavée de victoires, mais aussi d’échecs.
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